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La Pause

Françoise Cuissard
Annecy, 27 juin 2000

Poser pour une personne qui n’existe pas, mais dont on connait l’existence à travers la lecture d’un livre, ouvre les portes de l’imaginaire pour celle qui se laisse emporter dans le torrent de l’histoire, imaginaire elle aussi.
Pour jouer à la pause, nous étions montées sur la montagne au dessus du Lac d’Annecy, là où les rumeurs de la ville ne nous parviendraient plus. On entendait seulement tinter sur la crête de la colline, les cloches suspendues au cou des vaches Abondance, à la robe caramel et acajou, avec le bout des pattes et la queue blanche.
Nous nous sommes assises sur la pente douce de la grande prairie verte. J’ai demandé à Françoise de marcher, comme la Gradiva marchant sur les dalles grises en tuf de Pompéi.
Françoise-Gradiva lisait, puis se relevant souriante elle s’éloigna derrière un arbre.
A Pompéi, elle disparait dans la Casa de Méléagre derrière les colonnes ocre-jaune.
François prenait goût à la posture et ressentait intimement l’attitude à prendre.
C’est au moment où elle s’éloigna tenant le livre à la main, que je retins cette posture.
Là, et déjà partie.